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mardi 27 septembre 2016

Le CNIRÉ : un Comité Théodule constructiviste


Heureux comme un constructiviste
nommé dans un Conseil éducatif inutile


Article publié le 27.11.2014 :

Le 19 avril 2013, la ministre George-Pau Langevin installait un nouveau Comité Théodule à l’Éducation nationale (un de plus !) : le Conseil national de l’innovation et de la réussite éducative, dont la présidence a été confié à Didier Lapeyronnie, professeur de sociologie à l’université Paris-Sorbonne. Un sociologue, pourquoi pas ? J'en connais qui disent des choses intéressantes sur l'École... mais ils sont peu nombreux dans cette corporation habituellement favorable au constructivisme. 

En matière de “réussite éducative” et d’innovation, la ministre George-Pau Langevin avait l’air d’en connaître un bon bout puisque, lors de sa prise de parole au congrès de l’ICEM le 21 août de la même année, elle avait affirmé : « Ce que Célestin Freinet a posé comme questions demeure extrêmement actuel ». Misère ! Si elle en est réduite à invoquer des pratiques obsolètes datant des années 1920, cela en dit long sur ses compétences en tant que ministre déléguée à la “réussite éducative”.

Au passage, j’aurais plutôt parlé de réussite scolaire. La réussite éducative étant principalement du ressort des parents. Mais, passons…

Le 10 novembre 2014, ce Conseil national de l’innovation and so on publiait une synthèse de ses travaux. Il aura donc fallu 18 mois pour parvenir à pondre un document de 52 pages ! Le rendement est donc plutôt faible : un peu moins de 3 pages par mois.

D’autant plus que, dès la table des matières, on est particulièrement surpris de voir l’influence que semble avoir exercé Brighelli sur les auteurs. On est étonné de le trouver en cet endroit situé à mille lieues de l’école de Jules Ferry chère au pamphlétaire. Rappelons que Brighelli s’est fait connaître en 2005 avec son livre La fabrique du crétin. Manifestement, le crétin – les éducrates visés par le polémiste – a aimé ce terme de “fabrique” puisque trois des cinq chapitres du document reprennent le mot. On a ainsi des fabriques pour l’engagement, l’ouverture, la compétence. Voilà une belle anomalie ! Mais rassurez-vous : c’est la seule, car tout le reste est sans surprise.

Ne perdons pas de temps et allons directement aux 25 propositions et recommandations terminales. On y retrouve tous les poncifs apparus ces derniers mois : l’inévitable et omniprésente “bienveillance”, l’édulcoration des sanctions, la priorité aux concertations et aux parlotes vaines, le travail en équipe, le numérique, la coopération, les démarches de projet, le travail coopératif (encore !), l’évaluation forcément et uniquement positive, l’innovation comme règle de vie, la formation professionnelle conçue comme une conformation, la “perception ouverte” du métier (!), les expérimentations si possible loufoques, et – last but not least – « mettre en place une cérémonie d’accueil pour sensibiliser les nouveaux enseignants et personnels à l’éthique et les intégrer symboliquement dans la communauté éducative » [ne pas rire] ! Sans oublier, bien entendu, les parents d’élèves, nouveaux rois de l’École, avec l’augmentation de leur pouvoir, leur association automatique à toute décision, et l’instauration d’un médiateur école-familles dont on pressent que son rôle consistera surtout à défendre les deuxièmes contre la première.

Bref, n’en jetez plus : la cour est pleine.

Une seule proposition parvient à surnager dans ce naufrage de l’efficacité professionnelle des enseignants, la proposition 5 : « Reconnaître l’engagement des personnels dans les projets par le biais des rémunérations, des décharges, de l’accès aux formations ou par la progression de l’avancement. »

Parions déjà que si toutes les autres recommandations ont quelques chances d’aboutir, celle-ci est déjà condamnée à l’avance. Combien de fois nous l’a-t-on déjà servie… sans aucun résultat tangible. La carotte fait toujours avancer le bourricot.

En fait, la véritable innovation dans l’Éducation nationale serait de se mettre à choyer les enseignants, de les payer enfin décemment et de veiller pour de bon à ce qu’ils aient les meilleures conditions de travail possibles. Cela oui, ce serait vraiment nouveau. Pour ne pas dire innovant !



Article publié le 27.09.2016 :

J’ai déjà eu l’occasion de parler du CNIRÉ (Conseil national de l’innovation pour la réussite éducative), encore un fromage où caser les amis constructivistes plus ou moins radicaux. Comme si les démarches par découverte qu'ils revendiquent provoquaient la réussite ! Après quarante années de mise en application forcenée de ces pratiques dans l’École française, on est plus proche du désastre pédagogique que de la réussite, y compris “éducative”.

Najat Vallaud-Belkacem, actuelle ministre, a récemment prononcé un discours à Grenoble pour « renforcer la culture de l’innovation dans l’Éducation nationale ». Et relancer par la même occasion le CNIRÉ dont tout le monde avait depuis oublié l’existence. La ministre a annoncé la nomination de son nouveau président : sans surprise, il s’agit de Philippe Watrelot, membre éminent du CRAP, vivier de militants constructivistes conformes au dogme pédagogique en vigueur. Décidément, on trouve ces gens dans tous les fromages et leur règne, malgré les catastrophes qu’ils ont provoquées, n’est pas près de s’arrêter…

Le CNIRÉ a rendu la synthèse des travaux qu’il a conduit pendant deux ans. Un document de 36 pages, soit une moyenne d’une page et demie par mois ! Une telle cadence de travail montre à quel point on se moque du monde. Un vrai scandale.

D’autant que si on voulait véritablement innover, il suffirait tout simplement de renoncer à toutes les vieilles recettes de l’École “nouvelle” (qui aura bientôt un siècle), à toutes les lubies constructivistes et à toutes les démarches inefficaces par découverte. Parce que ces pratiques pédagogiques sont la cause fondamentale des inégalités scolaires : les élèves en difficulté s’y noient, les moyens boivent la tasse et les bons surnagent comme ils peuvent grâce à leur famille. La gabegie a assez duré.

La véritable innovation consisterait à mettre enfin en œuvre les pratiques d’enseignement efficaces. À commencer par l’Enseignement Explicite.

Et pas besoin d’un CNIRÉ pour cela. Tant pis pour le fromage…



Épilogue logique

29.03.2017



Et comme l'a dit @cassiaux_ sur Twitter :
“Waterloo, morgue pleine.”

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