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jeudi 21 novembre 2013

Méthode d'apprentissage de la lecture : "Je lis, j'écris"


Témoignage de Frédérique :



Je lis, j'écris. 
Un apprentissage culturel et moderne de la lecture

Auteurs :
Janine Reichstadt, Jean-Pierre Terrail, Geneviève Krick

Les Lettres bleues





dimanche 17 novembre 2013

Tabouret traditionnel et passoire constructiviste


Il y a peu, le 14 octobre dernier sur Le Café pédagogique, Rémi Brissiaud nous ressortait la bonne blague du tabouret :
« Pour bien faire comprendre la situation, risquons une métaphore et imaginons un pays dont les habitants pensent que pour apprendre à nager, il faut d’abord s’entraîner longuement à simuler les mouvements de la brasse hors de l’eau, sur un tabouret (…). En 1997, pour apprécier le niveau des élèves entrant au CP, il leur a été proposé une épreuve de brasse sur tabouret. Un peu après, les enfants de ce pays ne nageant pas aussi bien qu’espéré, il a été décidé d’abord en 2002, puis en 2008, de consacrer encore plus de temps à l’apprentissage des mouvements sur tabouret à l’école maternelle. L’épreuve de 1997, celle de brasse sur tabouret, a enfin été proposée aux élèves rentrant au CP en 2011 et, bien évidemment, ils avaient progressé EN BRASSE SUR TABOURET. Malheureusement, les résultats ont été annoncés sous la forme : « Grâce aux programmes récents de l’école maternelle, les élèves ont progressé EN NATATION ». Si la brasse sur tabouret éloigne les enfants de la natation plutôt que de les en rapprocher, on se rend compte de l’énormité de l’erreur commise ! »
On en rirait encore si cette métaphore constructiviste ne commençait pas à dater un peu. Nicole Garcia, dans son livre À l’école des dyslexiques, rappelle qu’elle est apparue dans les années 1970 chez les partisans des méthodes idéo-visuelles d’apprentissage de la lecture (qui, depuis, ont fait faillite avec le retentissement que l’on sait). On se gaussait de ces élèves qui, dans l’enseignement traditionnel, apprennent à lire comme on pourrait apprendre à nager sur un tabouret au bord de la piscine…

La blague était tellement bonne que les constructivistes la reprennent encore et encore, pensant toujours mettre les rieurs de leur côté.

Ils n’ont pas imaginé qu’on peut très bien filer cette métaphore à leur sujet. Ainsi la démarche constructiviste consiste à balancer les apprentis nageurs en plein milieu du grand bassin. Après quoi, on regarde ceux qui parviennent à surnager.

Notons qu’il vaut mieux, à tout prendre, l’enseignement traditionnel : il fait moins de victimes.

En pédagogie explicite, on regarde ce qui est efficace, on l'expérimente et on le reproduit. Les néophytes sont mis à l’eau, avec des flotteurs, sous la conduite d’un maître-nageur professionnel qui leur apprend les gestes nécessaires pour nager (modelage). Puis, au fur et à mesure que les élèves prennent de l’assurance, on enlève peu à peu les flotteurs (pratique guidée). Enfin, lorsque les apprentis nageurs sont bien assurés, on les met dans le grand bassin, toujours sous la surveillance active du maître-nageur (pratique autonome).

Rien de plus simple !




Autre métaphore : certains collègues se demandent en début de carrière s’ils doivent adopter les pédagogies de découverte ou un enseignement instructionniste.

Personnellement, je pense que pour naviguer il est préférable d’utiliser un bateau plutôt qu’une passoire. Même si on ne parle que de passoire en formation initiale ou en formation continue. Et même si la hiérarchie intermédiaire ne jure que par l'utilisation de la passoire. Après tout, on peut exercer son métier de manière professionnelle, en ayant le souci de l’efficacité et le goût du travail bien fait.




Enfin, d’autres collègues, pensant bien faire, préfèrent adopter en classe tantôt l’expérimentation constructiviste tantôt l’enseignement explicite.

Est-ce que le pédalo est utile pour venir en aide au cargo pris dans la tempête ? 

Ou alors, pour ceux qui préfèrent le plancher des vaches, on n’attelle pas une caravane, fût-elle constructiviste, à une voiture de course explicite.

Métaphores, métaphores…








vendredi 15 novembre 2013

Les loupés de l'apprentissage de la lecture


Une très intéressante étude vient de paraître sur l’effet-manuel dans l’apprentissage de la lecture au CP. Cet effet est décrit comme « considérable », selon le titre même du rapport de recherche.

Les conclusions tirées de ce travail rejoignent très exactement ce que les chercheurs en enseignement explicite ne cessent de dire, sur la base des travaux essentiellement menés en Amérique du Nord.




Mais voici ce que, par ailleurs, nous apprenons :

« L’enquête porte sur les milieux populaires, où l’échec scolaire est le plus élevé. Un sondage préalable a permis de déterminer les dispositifs d’apprentissage utilisés dans 215 classes de CP des établissements en “réseau éclair” (la partie la plus vulnérable des anciennes ZEP) de Paris et la petite couronne (92, 93, 94). On peut distinguer trois cas de figures :
- 77 % des enseignants ont adopté l’un des 23 manuels de la méthode mixte recensés dans le sondage ( À l’École des albums ; Abracadalire ; Bulle ; Chut ! je lis ; Fabulire ; Gaffi ; Grand large ; Je lis avec Dagobert ; Je lis avec Mona ; Justine ; Lecture tout terrain ; Max, Jules et leurs copains ; Mika ; Mots d’école ; Pas à page ; Patati patata ; Pour réussir mon apprentissage de la lecture ; Que d’histoires ; Ratus ; Ribambelle ; Rue des contes ; Taoki ; Un monde à lire) ;
- 19 % des enseignants « bricolent » leurs propres supports (outils personnels, travail sur fiches et sur textes) ou combinent l’usage de deux manuels différents ;
- 4 % des enseignants ont adopté la méthode syllabique, que beaucoup d’entre eux jugent trop rébarbative pour des publics populaires (manuels utilisés : Léo et Léa ; et Je lis, j’écris. Un apprentissage culturel et moderne de la lecture). »

Donc près de 80 % des enseignants utilisent une méthode à départ global et près de 20 % font du bricolage ! Que reste-t-il pour les méthodes efficaces phono-alphabétiques ? Pratiquement rien…

Et l’on s’étonne que les élèves des quartiers défavorisés connaissent autant de difficultés scolaires ?

La lecture est la base d’une scolarité réussie. Il faut donc mettre le paquet sur un apprentissage réussi grâce à des méthodes efficaces. Quel ministre, quel recteur, quel DASEN, quel IEN le rappellera à des enseignants dont, selon les termes mêmes de ce rapport, « la culture professionnelle (…) reste aujourd’hui fortement marquée par la thématique de la rénovation pédagogique des années 1970/80 », c’est-à-dire par les démarches inefficaces du constructivisme.

Quarante années d’errances auxquelles il faudrait avoir le courage de mettre un terme au plus tôt !


jeudi 7 novembre 2013

La moitié des élèves n'ont pas d'enseignement des sciences en Primaire

Avis présenté au nom de la Commission des Affaires culturelles et de l’éducation sur le projet de loi de finances pour 2014
par  Julie Sommaruga

Assemblée nationale
n° 1429
10.2013 


La députée PS Julie Sommaruga consacre donc ce rapport à l’enseignement des sciences au primaire et au collège.

Elle commence par un constat que chacun peut faire : « L’enseignement scientifique dispensé au primaire et au collège est en souffrance, voire en crise, ce que traduisent les résultats des élèves, qui par ailleurs manifestent peu d’intérêt pour les matières concernées. »

Précisant pour le Primaire : « D’une part, en calcul, les performances des élèves du primaire baissent ou stagnent, comme le montre l’enquête Lire, écrire, compter de la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP), effectuée en fin de CM2 en 1987, 1999 et 2007 [1]. Les scores obtenus entre 1987 et 1999 ont en effet diminué de manière importante, soit une diminution du score moyen d’environ deux tiers d’écart-type. De 1999 à 2007, il s’est opéré un tassement des résultats, avec un score moyen en légère baisse, mais de manière peu significative au regard des marges d’erreur inhérentes à ce type d’étude. (…) D’autre part, au primaire, comme au collège, on constate la persistance d’un “noyau dur” d’élèves en grande difficulté dans les sciences expérimentales. Les évaluations dites CEDRE [2] montrent ainsi qu’en fin d’école élémentaire, si plus de la moitié des élèves atteint un premier niveau de conceptualisation et peut exploiter des données organisées, 15 % des élèves ne peuvent répondre qu’à des questions en lien avec leur expérience quotidienne. »

Selon l’auteur du rapport, « cette situation résulte de facteurs structurels. » Lesquels ?

Il y a d'abord, bien sûr, les programmes, que les constructivistes de tout poil trouvent toujours trop lourds. L’air est connu : leurs objectifs sont « trop ambitieux et leur caractère élitiste et formel. » Explication : « Cette situation s’explique par le fait que cet enseignement, à commencer par celui des mathématiques, est conçu comme un outil de sélection scolaire. C’est l’un des effets pervers d’un système éducatif ultra-hiérarchisé. » Avec les mots “sélection” et “ultra-hiérarchisé”, inutile de rajouter quoi que ce soit. La sentence est tombée. Pourtant, il serait bon de préciser que ces fameux programmes “trop lourds” n'ont cessé d'être allégés depuis les années 80. Et ce n'est pas fini ! Quand on adopte des pratiques d'enseignements inefficaces comme les pratiques de découverte, on est bien obligé de rabattre ses prétentions encore et encore.

Ensuite, il y a la « la démarche d’investigation [qui] est préconisée par l’ensemble des programmes concernés du primaire et du collège. » Ce dont il faudrait « se réjouir ». Si on avait eu un doute après le couplet sur les programmes, on a ici la certitude que Julie Sommaruga est complètement acquise au camp constructiviste. Elle fait même fort en affirmant que cette démarche pédagogique « est indispensable à l’acquisition des fondamentaux  », alors que son caractère inefficace est maintenant largement prouvé. Les croyances ont la peau dure...

Selon l’auteur du rapport, si les enseignants ne les ont pas mise en œuvre (air connu), c’est parce que les conditions du métier se sont dégradées et parce que les formations initiale et continue sont insuffisantes. Bien que ces deux facteurs soient bien réels, ils n’expliquent en rien la faillite de l’enseignement des sciences. D'une part, la dégradation des conditions d’exercice du métier a un retentissement sur l’ensemble des enseignements dispensés et pas seulement sur les sciences. Et d'autre part, les insuffisances de la formation n'existent pas seulement en durée, mais aussi et surtout en contenu : depuis une quarantaine d'années,  les démarches de découverte bénéficient d’une sorte de monopole, surtout en sciences où les formateurs ne jurent que par La Main à la pâte. Or chaque praticien sait que ce dispositif est chronophage, difficile à mettre en œuvre et dispendieux. Passer un trimestre à montrer que l’eau qui chauffe se met à bouillir et celle qu’on refroidit finit par geler est une activité de centre aéré ou de colonie de vacances. Expérimenter sur du vide rappelle le titre du livre (inspiré par une expérience farfelue mais réelle tentée en classe) :  Le poisson rouge dans le Perrier… qui date de 1983. Déjà, à l’époque, on faisait n’importe quoi au prétexte de faire des sciences. Et il faudrait s’étonner de la faillite que déplore l’auteur de ce rapport ?

La réalité est qu'il faut d’abord enseigner les connaissances fondamentales avant de passer à l’expérimentation. Le novice n'est pas un expert, et les démarches qui conviennent à l'expert ne sont pas valides pour le novice.

Le résultat de toutes les errances pédagogiques, dont La Main à la pâte est l’aboutissement, fait que l’enseignement des sciences est aujourd’hui gravement sinistré. La preuve ? « Au primaire, un enseignement de sciences expérimentales qui ne serait pas assuré dans près de la moitié des classes. » (p 20) ; « environ une moitié encore des classes primaires françaises ne respectent sans doute pas les obligations d’enseignement des sciences expérimentales et d’observation » (citation d’un avis de l’Académie des sciences qui préconise obstinément depuis des années le dispositif de La Main à la pâte, prouvant ainsi qu’on peut être à la fois un savant dans sa discipline et un ignare en pédagogie). 

Les procédures d’enseignement des sciences sont devenues tellement compliquées que la moitié des enseignants du Primaire n’osent même plus les tenter. Les manuels, sur lesquels les professeurs et leurs élèves pouvaient s’appuyer, ont pratiquement disparu depuis que la mode est à l’investigation plutôt qu’à l’enseignement. Je dirais même que les constructivistes n’ont jamais eu besoin de manuels, car leur démarche pédagogique repose le plus souvent sur l'improvisation et le bricolage, si possible de dernière minute. L'enseignant devient ainsi un artiste qui réalise des performances. Et non un professionnel efficace.

On ne s'étonnera pas qu’au terme de ce parcours, la solution imaginée par Julie Sommaruga soit le recours à un comité Théodule. C'est décidément devenue une vraie habitude, dont la seule utilité se réduit à caser des copains. En l’occurrence, il s’agit de l’ASTEP, créé en 2009 et dont personne n’a jusqu’alors entendu parler [3]… en-dehors du petit cercle de la Fondation La Main à la pâte

Encore une fois, on préfère un machin-bidule qu’on monte en épingle... à la mise en place d’un enseignement explicite et structuré seul à même de renverser la tendance, de rendre leur efficacité aux démarches pédagogiques, de faire en sorte que les apprentissages des élèves débouchent sur des réussites.





[1] . Voir cet article.
[2] . Voir cet article.
[3] . Je vous donne la signification de ce nouvel acronyme : “accompagnement en sciences et technologie à l’école primaire”. Qui le savait ?

dimanche 3 novembre 2013

L’école constructiviste de dentisterie

Source : Forum Neoprofs


Auteur : Paratge

L’école constructiviste de dentisterie permet aux élèves de découvrir leurs propres procédures de traitement du canal radiculaire.

LYON

À l’école de médecine dentaire privée, on ne trouvera ni cotons tiges à l’ancienne ni schémas parodontaux comme on les appelle, ni même des amalgames. C’est parce que, dans cette institution d’apprentissage alternatif, les étudiants sont encouragés à rompre avec la tradition médicale et à découvrir leurs propres procédures.

« Chez nous, nous croyons que la dentisterie n’est pas que la pratique médicale qui traite les troubles de la dent et de la gencive, c’est plus que ça » déclare le directeur de l’école, le Dr Hubert Benoît, aux journalistes. « Il s’agit de favoriser la créativité, la promotion de l’expression de soi et l’individualité. Il s’agit de regarder une pulpe pourrie et d’en tirer ses propres conclusions. »

« En fait, ici la dentisterie c’est tout ce que nos étudiants veulent en faire » poursuit-il.

Fondée en 1991 et conçue d’après les méthodes d’enseignement développées d’abord par le grand pédagogue Philippe Reimieu, l’école propose un cycle de trois ans offre une approche fraîche et innovante de l’apprentissage qu’on trouve rarement dans les écoles plus classiques de dentisterie.

Les enseignants ou “facilitateurs itinérants dentaires”, comme ils préfèrent qu’on les appelle, peuvent être difficiles à repérer dans l’école : ils choisissent souvent de rester à l’écart de leurs étudiants curieux et ne font que de légères suggestions par exemple sur la façon dont un plancher radiculaire infecté doit être drainé.

« Lors du traitement d’un canal radiculaire, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise méthode » déclare la formatrice Vanessa Perrin qui ajoute qu’elle n’enseigne pas à ses étudiants comment traiter un nerf enflammé mais les conduit plutôt vers une bouche ouverte et prend ensuite du recul. « Bien sûr, nous pourrions dire à nos étudiants : “Ici l’émail est complètement érodé et doit être traité immédiatement.” Mais ce qui est plus satisfaisant, ce qui est plus dynamique, c’est de simplement laisser lentement se développer chez l’étudiant une “impression” de la raison pour laquelle un patient est en train de hurler. »

« Nous essayons d’encourager nos étudiants à travailler avec leurs patients afin de déterminer une solution à leur situation-problème » ajoute Perrin. « C’est une des nombreuses raisons pour lesquelles nous ne croyons pas à l’utilisation de l’anesthésie pendant les procédures chirurgicales. »

Selon ses administrateurs, l’école de médecine dentaire s’efforce de présenter une alternative à la structure dogmatique des autres écoles. En plus d’être libres de définir leur propre programme d’études, les étudiants de l’établissement privé peuvent prendre une pause pendant les opérations longues et compliquées s’ils s’ennuient ou ne se sentent pas inspirés.

L’atmosphère de tradition confinée et antiseptique est absente même des salles de classe qui sont des environnements reposants et qui sont parfois remplies de confortables canapés rembourrés plutôt que de chaises de dentistes.

« Si un étudiant est en train d’installer une couronne et sent à mi-parcours qu’il se sentirait mieux s’il faisait un implant dentaire, ici il peut le faire » dit le professeur Marcel Rufeau qui déclare qu’il voit le cabinet du dentiste comme un lieu d’exploration et d’expression et non comme un lieu de règles fixes. « Ici, ça n’existe pas, les gens qui “forent distraitement jusqu’à la gencive inférieure” ou qui “retirent par erreur la mauvaise incisive latérale maxillaire supérieure.

Les récents diplômés de la petite école indépendante sont d’accord : « Grâce à mes professeurs, je sens que je peux relever n’importe quel défi professionnel qui se présente », déclare le Dr Kevin Dugenou alors qu’une seringue remplie de Novocaïne coule lentement dans le fond de la gorge d’un patient vers ses poumons. « Ou, à tout le moins, je peux accepter que ce n’est pas la fin du monde si je n’y arrive pas. »


[Plus loin, un autre intervenant ajoute : « Ils en avaient ouvert une avec la même pédagogie pour former des pilotes de ligne mais elle a fermé après le premier cours sur l'atterrissage. »]