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mercredi 5 décembre 2012

Enseigner sans stress

Les enseignants les plus résilients sont ceux qui estiment faire du bon boulot

Jean-François Venne



Enseignante


Pourquoi certains enseignants aux niveaux primaire et secondaire résistent-ils mieux au stress que d’autres ? Selon une récente recherche, il ne s’agirait que d’une simple question de confiance en soi.

Éric Gosselin, professeur en psychologie du travail et des organisations à l’Université du Québec en Outaouais, a entrepris, en 2007, une étude sur le stress au travail des enseignants d’une commission scolaire de la région de l’Outaouais. Ses objectifs : dresser un portrait de l’état de santé mentale des enseignants, et comprendre pourquoi certains d’entre eux résistent mieux au stress que d’autres.

Le chercheur a réalisé une trentaine d’entrevues auprès d’enseignants, en plus de compiler les réponses de 420 enseignants et 25 membres de la direction à un questionnaire. Premier constat : plus de 85 pour cent des participants au sondage ont une bonne santé psychologique au travail. « De 10 pour cent à 15 pour cent des enseignants sont vulnérables à des problèmes liés au stress, comme la détresse psychologique ou l’épuisement professionnel », explique M. Gosselin.

M. Gosselin avance que les relations avec les parents, la direction ou les collègues ne posent pas trop de difficulté. Composer avec les problèmes de comportement, les difficultés d’apprentissage ou la démotivation des élèves est toutefois plus stressant, mais les résultats indiquent que les enseignants gèrent assez bien ce stress.

Il en va tout autrement de la charge de travail. « C’est vraiment le plus important marqueur de stress », souligne M. Gosselin. Beaucoup d’enseignants composent mal avec leur charge de travail, en raison de la taille des classes, de l’intégration d’élèves ayant des difficultés d’apprentissage ou de comportement, du manque de ressources, des exigences de préparation des cours et des tâches connexes exigées d’eux. Les plus résilients parviennent à s’accommoder du stress, mais pour les autres, le poids devient vite insupportable.

Quelles sont donc les différences entre les enseignants résilients et les plus vulnérables? D’abord, une difficulté à bien identifier et à exprimer leurs émotions. Cela diminue les capacités d’analyse et de résolution de problèmes.
Toutefois, la différence majeure est le sentiment de l’auto-efficacité. Les enseignants les plus résilients sont ceux qui, à tort ou à raison, estiment qu’ils font du bon boulot. Ceux-là sont plus satisfaits de leur emploi et moins vulnérables à l’épuisement professionnel ou à la détresse psychologique. À l’inverse, ceux qui manquent de confiance en eux ont de la difficulté à gérer leur stress.

« Cela n’a rien à voir avec le rendement réel, précise M. Gosselin. C’est une question de perception. » Selon lui, cela souligne le besoin d’élaborer des mécanismes d’évaluation, non pas pour traquer “les mauvais enseignants”, mais pour faire en sorte que chacun ait une idée plus juste de ses forces et de ses faiblesses. Il ne fait pas négliger la nécessité d’alléger la tâche des enseignants, mais entre-temps, certains ajustements pourraient en aider plusieurs à mieux résister au stress.