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lundi 29 avril 2013

Humour : Leçon de morale laïque

Source : Msieur Lapique




mardi 23 avril 2013

Le Conseil d’école : cheval de Troie dans l’École publique

[D’après un article de la Fédération Nationale de la Libre Pensée.]




– 1977 : Le gouvernement Giscard-Barre crée les Conseils d’École aux similitudes inquiétantes avec les Comités de surveillance des écoles de la loi Guizot (1833) ; rappelons qu’alors le secrétaire général du SNI-Pegc (FEN), Guy Georges, a dénoncé comme « la plus grave attaque contre l’école laïque depuis Pétain » la création de ces Conseils, cheval de Troie des groupes de pression et des élus politiques qui de tout temps ont cherché à s’insinuer dans le fonctionnement de l’École publique pour conformer la jeunesse à leurs visées politiques, religieuses ou économiques.

– 1985 : Le gouvernement Mitterrand-Fabius et son ministre de l’Éducation nationale J.-P. Chevènement étendent considérablement les prérogatives des Conseils d’École. Alors qu’ils n’étaient consultés que sur les conditions matérielles de fonctionnement de l’école, ils se voient attribuer un droit de regard sur la composition des classes, le choix des manuels, les sorties scolaires... D’un élu municipal, on passe à deux. Le nombre de représentants des parents devient identique à celui des enseignants qui se retrouvent désormais en minorité.

– 1990 : Par décret, le 6 septembre, le ministre Jospin élargit encore les pouvoirs du Conseil d’École qui dorénavant vote le règlement intérieur, établit le projet d’organisation de la semaine scolaire, donne tous avis et présente toutes suggestions sur le fonctionnement de l’école et sur toutes les questions intéressant la vie de l’école, statue sur la partie pédagogique du projet d’école, donne son accord sur l’organisation d’activités complémentaires, éducatives et culturelles, est informé sur l’aide spécialisée aux enfants en difficultés et consulté par le maire sur l’utilisation des locaux scolaires en dehors des heures d’ouverture de l’école. D’autres prérogatives ont été ajoutées depuis, notamment sur les conditions d’intégration des enfants handicapés.

– 1991 : Le ministre Jospin impose aux enseignants l’obligation de participer aux réunions du Conseil d’École (au moins trois par an).

– 1996 : Le rapport Fauroux, établi à la demande du gouvernement Chirac-Juppé, annonce : « Grâce aux Conseils d’école, les conditions sont réunies pour mettre en place l’autonomie des établissements ».

[On comprend alors pourquoi le même article indique ailleurs très justement :]

C’est le modèle de l’Enseignement privé avec l’autonomie de ses établissements, leur caractère propre, leur gestion locale par un Conseil d’Administration où siège le directeur diocésain, l’association omniprésente et toute puissante des parents d’élèves, les chefs d’établissement ayant une totale autorité sur les enseignants, qui va inspirer tous les réformateurs de l’École publique.

mardi 16 avril 2013

Naissance de la pédagogie “progressiste”

[Pour écrire les circonstances de l'apparition de la pédagogie “progressiste”, je me suis largement inspiré de la première partie (La construction d'une gauche pédagogique) du livre récent de Sandrine Garcia, À l'école des dyslexiques, dont je recommande vivement la lecture.]




Les acteurs


L’École moderne
Les méthodes de Célestin Freinet s’inscrivent dans le courant des pédagogies actives. Membre du PCF (Parti communiste français), il fréquente la Ligue internationale pour l’Éducation nouvelle. Les partisans des pédagogies nouvelles/actives créent le concept d’école traditionnelle pour mieux pouvoir se définir eux-mêmes.
Après la guerre, les relations de Freinet avec le GFEN et le PCF se dégradent. Freinet reproche au GFEN d’être du côté des « belles paroles », alors qu’il se place du côté de l’action. Freinet va même renommer son mouvement “École moderne” pour le distinguer de l’Éducation nouvelle. En 1950, une campagne est lancée contre lui par Georges Snyders, de la revue communiste La Nouvelle Critique. On reproche à Freinet son réformisme petit-bourgeois, alors que la pédagogie révolutionnaire doit être au service de l’édification du socialisme.
Freinet meurt en 1966 et son mouvement se développe.

Le GFEN (Groupe français de l’Éducation nouvelle)
Le GFEN a été créé en 1922 comme la section française de la Ligue internationale pour l’Éducation nouvelle. Henri Wallon, membre du PCF, en prend la direction de 1946 à sa mort, en 1962.
À la mort d’Henri Wallon en 1962, le GFEN prend ses distances avec la direction du PCF. Dans les années 1960-1970, les sociologues ébranlent la croyance dans l’école libératrice en mettant en relation origine sociale et réussite scolaire. Le livre de Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, Les Héritiers (1964), a alors un grand retentissement.

Le PCF (Parti communiste français)
Les conceptions du PCF sur l’école sont dominées par la ligne directrice imposée par Georges Cogniot dans les années 1930. L’école doit faciliter l’organisation du prolétariat, son éducation de classe, l’élévation de sa capacité de lutte. Le plan Langevin-Wallon (1947) constitue le référentiel pour la construction d’un système d’enseignement unifié et gratuit, pour lutter contre l’inégalité scolaire.
Dans les années 1960, le PCF rejette les analyses de Bourdieu et Passeron (la « sociologie fataliste »). Des acteurs de l’Éducation nationale membres du PCF élaborent alors des conceptions pédagogiques “révolutionnaires”, destinées à lutter contre l’échec des élèves des classes populaires. L’ancienne conception marxiste de l’école est réaménagée, car les méthodes révolutionnaires permettent au prolétariat d’accéder au savoir émancipateur. Un rôle positif est attribué aux échanges entre élèves dans les situations d’apprentissage, en opposition avec une conception “frontale”. C’est la naissance de la “pédagogie progressiste”. En politisant les démarches pédagogiques, on peut donner une expression marxiste aux pédagogies nouvelles.
Les pratiques pédagogiques sont créditées d’un pouvoir révolutionnaire en soi. La référence obligée à l’Éducation nouvelle s’accompagne d’une démarcation vis-à-vis de Freinet, au nom de la science et de la proscription du déchiffrage. Cela permet de repositionner le marxisme au sein des différents mouvements de l’Éducation nouvelle.

L’INP (Institut pédagogique national)
Il apparaît sous ce nom en 1956. L’INRP (1980) et l’IFÉ (2011) en sont la continuation.
En 1960, Roger Gal, qui dirige l’INP, anime une commission pour la réforme de l’enseignement du français. Proche des mouvements de l’Éducation nouvelle, il refuse l’hégémonie de la grammaire et son enseignement séparé.
Roger Gal est remplacé en 1966 par Louis Legrand, un inspecteur d’académie.

Les linguistes
Dans les années 1960, la linguistique est à l’« avant-scène de la modernité culturelle ». C’est la discipline pilote des sciences humaines. Les apports des linguistes universitaires rejoignent les conceptions des pédagogies nouvelles. Les démarches pédagogiques alternatives y gagnent une assise scientifique. Désormais, la critique se fait au nom de la “vérité scientifique”. L’intervention des linguistes est la garante « d’un corps de savoirs en prise directe avec la recherche contemporaine ».

L’AFPF (Association française des professeurs de français)
Créée en 1967, l’AFPF accueille les partisans de la linguistique et de la “pédagogie scientifique du français”. Sa prise de position fondatrice est le « manifeste des Charbonnières » (1969), qui soutient le plan de rénovation du français d’Hélène Romian. En 1973, l’AFPF devient l’AFEF (Association française des enseignants de français). L’association est dirigée par un membre du PCF.

L’AFL (Association française de la lecture)
Association fondée par le psychologue André Inizan. En 1973, Jean Foucambert en prend la direction. Il est à la fois membre du PCF, du GFEN et inspecteur de l’Éducation nationale rattaché à l’INRP.
Foucambert propose de renouer avec la méthode idéovisuelle que Decroly avait mise au point pour les enfants sourds. Pour lui, l’enfant soumis à l’apprentissage de la combinatoire est semblable au prolétaire soumis au travail à la chaîne, privé de l’exercice de son intelligence. Le déchiffrage doit donc être proscrit. L’alphabétisation est le propre de l’école traditionnelle, Foucambert veut lui substituer la “lecturisation”.
Le statut de l’apprenant est nié au profit de celui de « lecteur-expert », dont on cherche à installer le fonctionnement sans passer par le préalable de l’entraînement.


Les faits


Dans les années 1970, un nouvel esprit anime l’enseignement. Dans l’école primaire, l’heure est à la rénovation pédagogique. Du fait du psychologisme ambiant et de la foi en la spontanéité enfantine, on vise d’abord l’épanouissement de l’enfant.

1963-1966 : La “Commission Rouchette” (Maurice Rouchette est inspecteur) adopte les propositions de l’INP. La plupart des membres de cette commission adhéraient aux idées de l’Éducation nouvelle et avaient comme objectif de faire pénétrer les méthodes actives à l’école élémentaire, notamment les méthodes Freinet. Selon eux, le maître devait expliquer le moins possible, parler peu et provoquer le débat entre les élèves. Expérimenté entre 1967 et 1972, ce projet d’instruction constituera la référence de l’avant-garde pédagogique.

1972 : Plan de rénovation du français coordonné par Hélène Romian. Celle-ci est un ancien professeur de lettres modernes à l’École normale de Douai ; elle est membre du PCF et du GFEN ; et elle est rattachée à l’INRP. Le plan de rénovation s’appuie sur les linguistes Émile Genouvrier et Jean Peytard. Hélène Romian considère que l’activité de lecture est une « stratégie de traitement d’indices », inspirée par de nouvelles découvertes scientifiques. La linguistique et les nouvelles approches littéraires (analyse des « genres discursifs ») apparaissent comme les conditions d’une réduction des inégalités à l’école.

1975-1980 : Parution de 3 ouvrages qui révolutionnent les conceptions de la lecture :
- Eveline Charmeux, La lecture à l’école (1975)
- Jean Foucambert, La manière d’être lecteur de la maternelle au CM2 (1976)
- Laurence Lentin, Du parler au lire (1977)
Les pédagogies nouvelles refusent les méthodes syllabiques (qui empêcheraient la compréhension), s’opposent aux démarches pédagogiques « transmissives » et s’affranchissent du souci d’efficacité. Il ne s’agit pas d’aller du simple au complexe, mais d’installer l’élève dans la complexité. Ces pédagogies nouvelles s’institutionnalisent en passant dans les instructions officielles.
Les formateurs font des productions d’Evelyne Charmeux, de Jean Foucambert et de Laurence Lentin la base de la didactique en lecture.

1985 : Plateforme commune des Mouvements pédagogiques (dont l’AFL, le CRAP, le GFEN et l’ICEM). Opposition à la voie indirecte (déchiffrage) pour aller directement au sens par la lecture globale.

La production de modèles alternatifs à l’école traditionnelle conduit à minorer la question de l’efficacité des démarches pédagogiques. Leur valeur tient, d’une part, au rejet du déchiffrage, et d’autre part, à la référence à telle ou telle théorie savante. L’élève doit construire lui-même ses savoirs (influence de Piaget). Ces démarches délégitiment la progressivité des apprentissages et la nécessité de l’entraînement.
La pédagogie de l’« éveil » met l’accent sur le milieu stimulant que doit devenir l’école, par opposition à une pédagogie « mécanique » et « répétitive ».
Du point de vue des pratiques, il s’agit de redéfinir l’activité de l’enseignant comme une activité de mise en situation des élèves qui leur permettra de découvrir les savoirs sans que le maître fournisse des explications.
Ces principes pédagogiques sont partagés par l’ensemble des « innovateurs » et font la synthèse des apports de l’Éducation nouvelle. Les acteurs qui veulent changer l’école puisent dans le répertoire de l’Éducation nouvelle, car celle-ci fournit un point de vue structuré. L’école est conçue comme étant le lieu de mises en condition cognitives et sociales destinées à asseoir une société future. Changer l’ordre scolaire pour changer l’ordre social.

Loin de favoriser les enfants des milieux populaires, nous savons maintenant que ces pratiques pédagogiques renforcent les effets du capital culturel hérité par la famille. Proscrire la transmissivité au nom d’un idéal d’élève redécouvrant les savoirs aggrave considérablement les inégalités scolaires.

Cette pédagogie qui se disait “progressiste” a été un facteur de régression pénalisant les humbles. En d'autres termes, une escroquerie...

jeudi 11 avril 2013

La nébuleuse de SOS-Éducation

« SOS-Éducation n'entend nullement remettre l'École publique sur les rails. En créant la confusion dans l'esprit des parents, en les dressant contre les professeurs, elle orchestre, en réalité, sa destruction dans le seul but d'imposer sa propre “solution” : le démantèlement de l'Éducation nationale au profit d'écoles privées financées par le “chèque éducation”. »




Pour en savoir plus sur SOS-Éducation et ses satellites, voir cet article.

Voir ce que j'en pense dans le commentaire de ce livre.

Rappelons aussi que SOS-Éducation avait traîné en justice les associations Reconstruire l'école et Sauver Les Lettres pour “injure et diffamation”, suite à un communiqué de presse commun paru le 24 octobre 2006 et intitulé La défense des savoirs ne passe pas par SOS-Éducation (reproduit en bas de cet article). En novembre 2008, ces deux associations bien connue pour leur engagement en faveur d'une école publique de qualité étaient relaxées. Mais SOS-Éducation poursuivant sa vindicte fit appel de ce jugement, avant de se faire débouter de l'intégralité de ses demandes en juillet 2009 . Voir le dossier sur le site de SLL.

Voici la liste des sites de SOS-Éducation, émanant ou ayant des connexions avec SOS-Éducation. Comme la nébuleuse est particulièrement opaque, il est possible que certains sites qui mériteraient de figurer dans cette liste soient absents. Merci de me les signaler.

Bien entendu, je laisse le soin aux curieux de chercher par eux-mêmes les liens Internet des sites ci-dessous indiqués.


Sites directement liés à SOS-Éducation :
Le site SOS-Éducation
Le blog SOS-Éducation
La chaîne YouTube de SOS-Éducation
Compte Facebook de SOS-Éducation 
Compte Twitter de SOS-Éducation

Sites émanant de SOS-Éducation :
[Par ordre alphabétique]
- Blog de la liberté scolaire : Anne Coffinier (Fondation pour l’école).
- Créer son école : Pour créer des écoles dépendant de SOS-Éducation.
- Fondation pour l’école : Favorable aux écoles hors-contrat : « Susciter un renouveau éducatif en France en concourant à l’essor d’établissements scolaires libres, ne bénéficiant pas, en l’état actuel du droit, du soutien financier direct de l’État. »
- Institut Libre de Formation des Maîtres : Créé par la Fondation pour l’école pour former les enseignants des écoles de SOS-Éducation.

Sites en connexion avec SOS-Éducation :
[Par ordre alphabétique]
- Enseignement et Liberté : Anne Coffinier est administratrice.
- La Librairie des écoles : Fondée en 2007, cette maison d’édition de manuels scolaires se dit indépendante de SOS-Éducation. Remarquons toutefois qu’elle est dirigée par Jean Nemo qui est le fils du philosophe libéral Philippe Nemo, référence intellectuelle de SOS-Éducation. En décembre 2007, SOS-Éducation lance une campagne pour des manuels scolaires “de qualité”... édités par la Librairie des écoles (voir le numéro 3 de La lettre de SOS-Éducation). En juillet 2008, la Librairie des écoles reçoit un prix pour « l’excellence éducative » décerné par SOS-Éducation (voir le numéro 5 de La lettre de  SOS-Éducation) grâce à un généreux donateur, Saud Bahwan, un marchand d’automobiles du sultanat d’Oman ! Depuis, le parrainage de SOS-Éducation est soigneusement dissimulé : il s'agit de vendre des manuels aux instituteurs crédules du service public. Pour ce faire, la Librairie des écoles est devenue en 2010 une filiale des éditions Magnard : un paravent utile pour faire oublier ses origines et ses liens avec SOS-Éducation. Se revendiquer de Magnard permet de passer pour une maison d'édition “normale”, sans liens militants douteux. Mais, en cherchant bien, il reste encore - ce jour - un pavé publicitaire pour La Librairie des écoles en page d’accueil du site Créer son école. Je le reproduis ci-dessous avant qu'il ne soit à son tour escamoté.  



- Lire-Écrire : Se veut un lieu de « soutien pédagogique des familles », dans le sens le plus traditionnel du terme.
- OIDEL : Organisation internationale pour le droit à l’éducation, «  collabore avec de nombreux experts et intervient auprès des organisations internationales et des gouvernements dans le but de promouvoir le droit à l'éducation et la liberté d'enseignement. » Bref : le lobby de l'enseignement privé...
- Permis de lire : « Collectif pour un enseignement efficace de la lecture » ayant embrigadé Marc-Olivier Sephiha et Marc Le Bris.
Pratiques pédagogiques : Site satellite de Lire-Écrire pour faire connaître les “bonnes pratiques”. Celles-ci se réclament de l'enseignement explicite bien qu'elles soient de fait très traditionnelles, selon la tactique de SOS-Éducation qui donne un air “moderne” à l'enseignement traditionnel qu'il prône en l'appelant “explicite” par abus de langage. Certains instituteurs qui apparaissent dans ce site sont des anciens du GRIP-SLECC, aujourd'hui membres de Trans-Maître, ce qui les amène à collaborer également avec d'autres officines de SOS-Éducation.
- Trans-Maître : Association créée à la suite d’une scission du GRIP ayant entraîné le départ d’instituteurs SLECC vers SOS-Éducation. Ce groupe est très lié à Lire-Écrire.
- Veille Éducation : Site de veille « sur l’école dans une perspective chrétienne » tenu par des anonymes qui ne tiennent pas à se démasquer et qui défendent âprement SOS-Éducation. [Ce site semble s'être sabordé en janvier 2014, ce qui n'est pas une grande perte.]


Après s'être longtemps réclamés du modèle traditionnel (voir illustration ci-dessus), certains de ces sites parlent maintenant de « pédagogies efficaces » ou de « pédagogie explicite et structurée ». Les partisans de l’école publique et laïque ne doivent pas se laisser abuser : il faut pertinemment savoir à quoi s'en tenir avec SOS-Éducation et ses affidés pour ne pas servir de compagnons de route ou, pire encore, d'idiots utiles.




Annexe :

Communiqué de presse du 24 octobre 2006


Ecole : la défense des savoirs ne passe pas par SOS-Education.


Les associations signataires de ce communiqué commun mènent depuis de longues années une lutte sans concessions pour un enseignement de qualité dans une école ouverte à tous. A l'heure où nos idées commencent à percer dans l'opinion, nous aimerions éviter que des mesures maladroites, émanant d'un ministère plus ou moins bien intentionné, aboutissent à des résultats contre-productifs. Nous ne tolérerons pas que notre combat soit dévoyé par le groupuscule malfaisant qui se cache sous l'étiquette de SOS-Education.

Nous rappelons d'abord qu'il convient de distinguer entre programmes et méthodes pédagogiques. Au-delà des querelles sur la lecture, nous préconisons une refonte totale des programmes depuis le primaire jusqu'au lycée, pour aboutir à des contenus d'enseignement riches, progressifs et cohérents, dans toutes les disciplines et sur l'ensemble de la scolarité. Un tel objectif suppose que soient fournies aux élèves les bases indispensables en français et en mathématiques. Nous exigeons d'abord le retour à un apprentissage systématique de la grammaire et de l'orthographe et l'abandon des "séquences" où tout se mélange et dont rien ne survit. Nous exigeons aussi que la littérature fasse l'objet d'un enseignement spécifique, fondé sur l'étude approfondie des œuvres au lieu de les subordonner à un inventaire techniciste de catégories prédéfinies. En mathématiques, l'école primaire doit apporter les bases du calcul et de la géométrie plane et la rigueur des démonstrations doit être réintroduite dès le collège. De plus, des filières clairement définies doivent être rétablies à partir de la seconde et les différents baccalauréats généraux donner à leurs lauréats les connaissances nécessaires pour accéder à l'enseignement supérieur. La terminale S ne doit plus être le refuge des meilleurs élèves, qu'ils se destinent ou non à des études scientifiques : les lettres, les mathématiques, les sciences expérimentales et les sciences sociales sont d'égale dignité et méritent le même traitement dans le cadre de baccalauréats profondément rénovés.

Dans le cadre de ces nouveaux programmes, la liberté pédagogique des professeurs doit être totale : ni le ministère, ni l'inspection n'ont à dicter leur loi en la matière, pas plus que les nouveaux "conseils pédagogiques". Cela étant, cette liberté ne peut s'exercer dans le vide : nous exigeons que les différentes méthodes d'apprentissage soient enseignées dans les IUFM d'une façon claire et non biaisée et que les manuels correspondants se trouvent dans tous les centres de documentation. Chaque professeur se déterminera ensuite, librement, en fonction des connaissances à transmettre, de sa propre expérience et de la réalité de ses classes. C'est sur la seule base des résultats obtenus que son travail devra être évalué par l'inspection.

Pour terminer, nous dénonçons avec la plus grande vigueur les méthodes et les objectifs de SOS-Education. Cette association a engrangé des moyens financiers considérables en copiant la recette d'"Avenir de la Culture", émanation française d'une secte internationale de catholiques intégristes, "Tradition-Famille-Propriété", qui fut mise au ban par l'épiscopat pour avoir voulu assassiner le pape Jean-Paul II, trop "laxiste" à son goût. Les 64000 adhérents dont se prévaut SOS-Education sont, pour la plupart, les victimes d'une opération de publipostage massif et ciblé : les premiers "dons" ont été recueillis auprès de grands-mères inquiètes de l'ignorance et de la "dépravation sexuelle" de la jeunesse. Une telle façon de procéder, bien décrite dans un rapport de l’Assemblée nationale à propos d’"Avenir de la culture", a vocation à multiplier géométriquement le produit des dons et permet à l’association de toucher un nombre toujours plus grand de parents. Sur la base d’affirmations tronquées ou mensongères, SOS-Éducation les invite alors à participer à de faux "référendums", lance des campagnes d'intimidation contre diverses maisons d'édition, exerce des pressions incessantes et de toutes natures auprès des pouvoirs publics, des élus, des responsables politiques, des journalistes et des familles conformément, là aussi, aux techniques déjà bien rodées d’"Avenir de la Culture". Se contentant de voler sur nos propres sites Internet des informations et des analyses qu'ils sont bien incapables de produire eux-mêmes et qu'ils déforment pour les adapter à leur mauvaise cause, les dirigeants de SOS-Education ambitionnent aujourd'hui de passer pour le fer de lance d’un renouveau de l’école tout en engageant, sous le prétexte de réaliser un sondage sur les manuels de lecture, une véritable campagne d'appel à la délation des instituteurs "non-conformes".

SOS-Education n'entend nullement remettre l'Ecole publique sur les rails. En créant la confusion dans l'esprit des parents, en les dressant contre les professeurs, elle orchestre, en réalité, sa destruction dans le seul but d'imposer sa propre "solution" : le démantèlement de l'Education nationale au profit d'écoles privées financées par le "chèque éducation". SOS-Éducation s'inscrit ainsi dans cette nébuleuse d'associations rassemblées autour d’une prétendue "Révolution bleue" pour construire en France un pôle d'extrême-droite ultralibérale. Rien ne saurait être plus éloigné de notre propre conception d'une Ecole de qualité, publique, laïque et gratuite.

Reconstruire l’école – Sauver les lettres – Sauver les maths