Bruno Suchaut
Plus de maîtres que de classes
Analyse des conditions de l’efficacité du dispositif
La loi de refondation de l’école prévoit que sur les postes
d’enseignants qui vont être créés, 7000 (soit le tiers) seront affectés
au dispositif “plus de maîtres que de classes”. Si l'on en croit le ministre Peillon, ce
dispositif va « changer la pédagogie ». Pas moins ! Et peu importent les pratiques
d’enseignement adoptées dans ces classes. Comme si on ne pouvait pas être inefficace, tout seul ou à deux...
Les choses ne sont bien sûr pas si simples et Bruno Suchaut nous le montre
avec beaucoup de clarté dans cette nouvelle étude qui s’appuie sur les
résultats de la recherche en éducation. L’auteur y examine deux aspects :
« Le premier concerne les conditions
de son efficacité au regard des résultats d’évaluations de dispositifs
comparables en France et à l’étranger. Le second aspect a trait à la mise en
œuvre concrète de la mesure dans les écoles en identifiant des solutions
pédagogiques pertinentes et, par opposition, les facteurs qui présentent un
risque au niveau de leur efficacité et leur efficience. »
Parlons justement de ces solutions pédagogiques pertinentes.
Pour Bruno Suchaut, cela ne fait aucun doute, il s’agit d’appliquer les
techniques de l’enseignement explicite, à plus forte raison en petits groupes :
« On sait que le travail en petits
groupes facilite les stratégies d’enseignement efficaces pour les élèves en
difficulté dans différentes dimensions des apprentissages scolaires et
constitue un cadre propice à la pédagogie explicite qui elle-même favorise la
compréhension et le maintien des notions en mémoire. »
Laissons la conclusion à Bruno Suchaut [passages
soulignés par moi] :
« Si la
difficulté scolaire est un constat qui ne cesse d’interroger les politiques
éducatives dans beaucoup de pays, celui-ci prend un sens particulier en France
car les indicateurs qui rendent compte de la qualité des apprentissages des
élèves évoluent négativement depuis plusieurs années. Si le dispositif “plus de
maîtres que de classes” peut être considéré comme une forme de réponse adéquate
à ce constat dans les écoles accueillant une forte proportion d’élèves en
difficulté, certaines conditions demandent à être respectées. En effet,
les évaluations de dispositifs comparables sont loin de nous fournir des
résultats systématiquement positifs. Par rapport à une réduction massive de la
taille de la classe, la dotation en maîtres surnuméraires apparaît, certes
moins coûteuse, mais d’une efficacité incertaine si la mesure n’est pas
fortement cadrée. Il ne s’agit pas seulement d’innover dans le seul but
d’innover et sans un projet précisant l’organisation du travail des enseignants
(les titulaires de la classe et l’enseignant supplémentaire). Il existe en
revanche des organisations pertinentes basées sur la prise en charge de petits
groupes d’élèves ou sous la forme de tutorat dans la classe sur des activités
bien précises en référence à des approches qui ont montré leur efficacité,
dans l’apprentissage de la lecture notamment. Ce sont donc celles-ci qu’il faut
favoriser et développer dans la mise en œuvre du dispositif si l’on veut se
donner des garanties sérieuses en matière de réussite. »
Mais les veut-on vraiment, au ministère, ces garanties sérieuses ?
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