Auteurs : Marc Colmant et Marion Le Cam
Note d'information, n° 17.24
12.2017
L’étude internationale PIRLS 2016 mesure les performances en
compréhension de l’écrit des élèves en fin de quatrième année de scolarité
obligatoire (CM1 pour la France).
Avec un score de 511 points, la France se situe au-delà de
la moyenne internationale (500 points) mais en deçà de la moyenne européenne
(540 points) et de celle de l'OCDE (541 points).
Depuis PIRLS 2001, la performance globale française baisse
progressivement à chaque évaluation. En 2016, l’écart est significatif et
représente -14 points sur la période de quinze ans.
Les performances basées sur la compréhension de textes
informatifs baissent davantage (-22 points) que celles des textes narratifs (-6
points).
Les processus de compréhension les plus complexes
(Interpréter et Apprécier) baissent davantage (-21 points) que les plus simples
(Prélever et Inférer, -8 points).
Les enseignants français sont moins nombreux que leurs
collègues européens à déclarer proposer à leurs élèves chaque semaine des
activités susceptibles de développer leurs stratégies et leurs compétences en
compréhension de l’écrit.
Cinquante pays ont participé à l’enquête internationale
PIRLS (Progress in International Reading
Literacy Study) organisée par l’IEA pour évaluer les performances en
compréhension de l’écrit des élèves de CM1 (L'IEA [International Association for the Evaluation of Educational Achievement]
est une association scientifique indépendante à but non lucratif, créée en
1958, qui met en œuvre des études comparatives à échelle internationale dans le
domaine de l’éducation). En France, c'est la DEPP qui a conduit l'enquête fin
mars 2016.
La classe-cible de l’enquête est celle qui représente quatre
années d’enseignement après le début des apprentissages systématiques de la
lecture, de l’écriture et des mathématiques. PIRLS s’intéresse à l’ensemble des
élèves présents à ce niveau de la scolarité, quels que soient leur âge, leur
parcours et l’organisation du système éducatif (proportion d’élèves en retard,
etc.).
Au moment de la passation, la moyenne d’âge internationale
est de 10,2 ans ; la moyenne européenne est de 10,3 ans ; les élèves
français ont 9,8 ans et sont donc parmi les plus jeunes avec les Italiens et
les Maltais (9,7 ans). Les plus âgés sont les Lettons (10,9 ans), les
Bulgares, les Lituaniens et les Danois (10,8 ans). Les politiques de chaque
pays en matière d'âge de scolarisation, de promotion et de redoublement, ne
permettent pas d’établir un lien direct entre résultats et âge moyen des
élèves.
En France, les élèves évalués dans PIRLS 2016 par la DEPP
ont effectué leur cours préparatoire (CP) pendant l’année scolaire 2012-2013,
voire 2011-2012 s’ils ont connu un redoublement.
Les programmes de 2008, suivis par ces élèves, indiquent
qu’à cette étape de la scolarité, « la
lecture continue à faire l’objet d’un apprentissage systématique :
phrases ; textes scolaires ; textes informatifs et
documentaires ; textes littéraires. L’élève apprend à comprendre en
reformulant et en répondant à des questions. Il appuie sa compréhension sur les
éléments du texte (sujet, personnages, événements), et sur une analyse précise
(titre, organisation, ponctuation, mots de liaison, pronoms, temps verbaux,
champs lexicaux). »
Un score supérieur à la moyenne internationale, mais nettement en retrait de celui des pays de l’Union européenne
Les élèves français obtiennent un score moyen de 511. Ce
score est significativement supérieur à la moyenne internationale de l’échelle
PIRLS fixée à 500. Le score moyen de la France est différent de manière
statistiquement significative de celui de chacun des pays de l’étude : 33
pays ont un score supérieur à la France et 16 pays, un score inférieur.
La Fédération de Russie (581), Singapour (575), Hong Kong
(569) se partagent les meilleurs résultats. Le premier pays de l’Union européenne
est l’Irlande (567).
Pour mieux rendre compte des résultats français, il est
pertinent de restreindre la comparaison aux pays qui lui sont les plus proches,
soit économiquement (pays membres de l’OCDE), soit d’un point de vue
politico-économique et géographique (pays membres de l’Union européenne).
1. Regroupements des pays proches de la France
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Les résultats français se situent sous la moyenne, tant des
pays de l’Union européenne que des pays de l’OCDE : avec un score de 511,
la France se situe environ 30 points de score en deçà de la moyenne de ces
pays.
En France, on observe une dispersion des scores des élèves
autour de la moyenne légèrement inférieure à celle de l’ensemble des pays
européens (écart-type 69 ; pour 71 dans l’Union européenne). L’écart-type
européen le plus faible s’observe aux Pays-Bas (60) où les résultats sont par
conséquent plus homogènes, c’était déjà le cas dans PIRLS 2011.
2. Répartition des performances des pays de l'Union
européenne
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Surreprésentation des élèves français dans le groupe le plus faible
Lorsque l'on ordonne tous les élèves des pays européens
participants en fonction de leur score et que l'on découpe cet ensemble en
quarts, on observe que les élèves français se trouvent surreprésentés dans le
groupe le plus faible : ils sont 39 %, au lieu des 25 % attendus. À
l’inverse, seuls 12 % des élèves français, au lieu des 25 % attendus, font
partie du quart européen le plus performant.
Par ailleurs, lorsqu’on étudie les distributions des scores
des pays européens par déciles (soit dix groupes de même effectif), on observe
pour la France une invariabilité de rang. Quel que soit le décile français
auquel on s’intéresse, son score moyen est plus faible que celui des autres
pays européens. Aucun sous-groupe d’élèves français (les plus forts, les plus
faibles ou les autres...) ne s’éloigne du classement global de la France.
6 % des élèves français n’atteignent pas le niveau le plus élémentaire de PIRLS
PIRLS caractérise le niveau des élèves à partir de scores de
référence. Les élèves doivent obtenir un score d’au moins 625 pour atteindre un
niveau avancé ; 550 ou plus pour le niveau élevé ;
475 ou plus pour le niveau intermédiaire ; 400 ou plus pour le
niveau bas qui correspond à des compétences élémentaires. Avec
un score inférieur à 400, les élèves n'attestent pas de la maîtrise des
connaissances élémentaires. En France, 6 % des élèves sont dans ce cas contre 4
% en Europe, cette différence est statistiquement significative.
Par ailleurs, les élèves sont trois fois plus nombreux dans l’Union européenne
(12 %) à atteindre le niveau avancé, qu’en France (4 %).
3. Évolution des pourcentages d'élèves atteignant les
niveaux PIRLS
(en %)
(en %)
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Avantage aux filles
Les filles obtiennent des performances supérieures à celles
des garçons dans tous les pays à l’exception du Portugal, où la différence
n’est pas significative. En France, l’écart entre filles (515) et garçons (507)
est un des moins marqués : 8 points, contre 13 en moyenne européenne et 19
en moyenne internationale.
Les jeunes Françaises, avec un score moyen de 515, sont 32
points au-dessous de la moyenne des filles européennes (547) ; les jeunes
Français (507) sont un peu moins distancés par les garçons européens (534)
(écart de 27 points).
Baisse significative des résultats par rapport aux cycles précédents
PIRLS 2016 est constituée pour moitié de textes et de
questions utilisés lors des cycles précédents. Ce fort ancrage permet une
comparaison temporelle statistiquement fiable.
Depuis 2001, le score moyen global de la France baisse
tendanciellement pour passer de 525 en 2001 à 511 en 2016. Ces différences, à
cinq, dix ou quinze ans, sont significatives, il est donc possible d’affirmer
qu’elles sont bien dues à une érosion des performances.
4. Évolution du score moyen et de l'écart-type de la
France
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20 pays, dont 13 européens, ont participé à PIRLS à quinze
années d’intervalle. Pour ce groupe de pays, la tendance est haussière (en moyenne
+13 points de score entre 2001 et 2016). Parmi eux, 11 obtiennent des scores en
2016 significativement supérieurs à ceux obtenus en 2001 ; 7 ont des
performances inchangées et 2 voient leurs scores baisser : les Pays-Bas (-9
points) et la France (-14 points).
En quinze ans, une baisse marquée sur les textes informatifs...
Deux échelles de scores indépendantes rendent compte des
performances en fonction des types de textes proposés : « informatifs » ou
« narratifs ». Par construction, la moyenne internationale de ces deux échelles
est de 500. Le calcul de la moyenne européenne, en 2016 s'établit à 542 points
pour ce qui concerne les textes « informatifs », et à 539 points pour les
textes « narratifs ». (Il faut comprendre que ces deux échelles, narrative et
informative, ne sont pas directement comparables. Elles représentent des
concepts différents et les items constitutifs de chaque échelle ont des niveaux
de difficulté quelque peu différents. La mise à l’échelle MRI, en calant ces
deux échelles sur celles des résultats globaux, prend en compte ces niveaux de
difficulté. Il devient alors possible de comparer ces sous-scores aux scores
globaux).
En France, ces deux sous-scores sont respectivement de 510
et 513.
La comparaison sur quinze ans montre une baisse
significative des performances (-22 points) sur la compréhension des textes
informatifs, ce qui n’est pas le cas pour les textes narratifs (-6 points).
5. Évolution du score moyen de la France en fonction des
types de textes
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Les filles françaises attestent d'une compréhension
significativement meilleure des textes narratifs que les garçons (518 points
contre 507), alors que la différence observée n’est pas significative en ce qui
concerne les textes informatifs (513 points contre 508 pour les garçons).
... et sur les processus de compréhension les plus complexes
Les quatre processus « Prélever », « Inférer », «
Interpréter » et « Apprécier » ont été regroupés afin de créer deux échelles de
scores indépendantes (ces deux groupes de processus sont hiérarchisés dans leur
degré de complexité. Au niveau européen, le taux de réussite des items est de
72 % pour « Prélever et Inférer » et de 52 % pour « Interpréter et Apprécier
»). Par construction, la moyenne internationale de ces deux échelles est de
500. Le calcul de la moyenne européenne, en 2016, s'établit à 542 points pour
ce qui concerne les processus « Prélever et Inférer », et à 539 points pour les
processus « Interpréter et Apprécier ».
En France, ces deux sous-scores, respectivement 521 et 501,
s’écartent significativement du score global français (511), mettant en
évidence une force relative sur les processus les plus simples « Prélever et
Inférer » et une faiblesse relative sur les processus les plus complexes «
Interpréter et Apprécier ».
L’Allemagne, l’Autriche et la République tchèque ressemblent
à la France sur ce point. À l’inverse, les élèves de Pologne et de Lettonie
obtiennent des scores significativement supérieurs pour « Interpréter et
Apprécier ». Ces différences de profil s’expliquent vraisemblablement par
l’accent plus ou moins marqué que met chaque système éducatif sur l’enseignement
de ces processus de compréhension, à ce niveau de scolarité.
La comparaison sur quinze ans montre une baisse
significative des performances sur les deux groupes de processus. Toutefois, la
baisse est presque 3 fois plus importante lorsque la compréhension impose aux
élèves de mettre en jeu les processus les plus complexes (-21 points) que
lorsqu’elle demande seulement d’utiliser des processus les plus simples (-8
points).
6. Évolution du score moyen de la France en fonction des
processus de compréhension
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Plus de temps consacré au langage qu’ailleurs en Europe
En langue française, 288 heures annuelles d’enseignement
sont prescrites au moment de l’enquête, par les programmes officiels de 2008.
Les enseignants affirment aller au-delà et consacrer 330 heures (soit un
excédent de 15 %) à l’enseignement de la langue, y compris la lecture,
l'écriture, l'expression orale, la littérature et d'autres compétences
linguistiques. La moyenne déclarée par les enseignants des autres pays européens
est de 236 heures.
Les enseignants français disent consacrer 165 heures
spécifiquement à la lecture-compréhension, y compris à travers les autres
champs disciplinaires, contre 146 heures dans les autres pays européens.
Les enseignants de CM1 déclarent passer 19 % du temps de
classe à l’enseignement de la lecture-compréhension et plus généralement 37 % à
l’enseignement de la langue française. En moyenne, dans les autres pays de
l’Union européenne, ces valeurs sont respectivement de 18 % et 28 % pour la
langue de chacun de ces pays.
Des activités pour aider à la compréhension de l’écrit moins fréquentes en France
Les enseignants français sont moins nombreux que leurs
collègues européens à déclarer proposer à leurs élèves de manière hebdomadaire
des activités susceptibles de développer leurs stratégies et leurs compétences
en compréhension de l’écrit. En moyenne, l’écart sur
l’ensemble de ces activités est de - 15%, mais il peut aller du simple au
double (par exemple, 41 % des élèves français sont sollicités au moins une fois
par semaine pour « Comparer ce que les élèves ont lu à des faits qu’ils ont vécu
», contre 82 % des autres élèves européens).
7. À quelle fréquence demandez-vous aux élèves de faire
les choses suivantes pour les aider à développer leurs aptitudes ou leurs
stratégies de compréhension de l’écrit ?
Cliquer sur l'image pour l'agrandir.
Une formation continue limitée
Interrogés sur leur éventuelle participation à une formation
professionnelle en lecture-compréhension au cours des deux dernières années
(stages, ateliers, séminaires, etc.), les enseignants français mettent en
évidence un développement professionnel restreint par rapport aux autres pays.
Ainsi, 38 % des élèves français ont des enseignants qui n’ont participé à
aucune formation contre 22 % en moyenne pour les autres pays européens.
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