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samedi 27 janvier 2018

Éduscol et l'Explicite





En décembre 2016, le site Éduscol mettait en ligne un article intitulé : Un dossier pour « Enseigner plus explicitement ».

Évidemment, je m’étais réjoui d’une telle publication mais j’ai aussitôt déchanté lorsque j’ai parcouru son contenu. Ce dossier était une pièce de plus dans la tentative de mainmise constructiviste sur l’Enseignement Explicite, suite à l'offensive lancée quelques mois plus tôt par le Centre Alain Savary. Les lecteurs intéressés par cet épisode se reporteront avec profit à cette page.

“Enseigner plus explicitement” est présenté, dès sa page de garde, comme un « Dossier issu d’un groupe de travail, piloté par le bureau de l’éducation prioritaire de la DGESCO, visant à préciser et illustrer le concept d’explicitation tel qu’il est pensé dans le référentiel de l’éducation prioritaire. » Le fait que la DGESCO apparaisse dans l’intitulé a abusé des collègues qui ont cru que c’était un document officiel ayant l'autorité du ministère. Une escroquerie de plus…

Quels en sont les auteurs ?



Comme on le voit, aucun nom représentatif du courant de la Pédagogie Explicite ou habilité par lui. Aucun spécialiste de la question, aucune personne ayant suffisamment d’autorité scientifique ou d’expérience concrète pour prendre sérieusement la parole sur le sujet.

Dès l’introduction, l’intention est clairement affichée : « “Enseigner plus explicitement”, tel que présenté dans le référentiel de l’éducation prioritaire, recouvre un ensemble de gestes, de postures et de pratiques pédagogiques à conduire dans le quotidien de la classe. Il ne saurait être réduit ou assimilé au seul concept “d’instruction directe” venu du continent nord-américain qui correspond à une méthode spécifique et systématique d’enseignement. » Or, ce n'est pas ce qui est dit dans le référentiel de l'éducation prioritaire où on peut lire ce qui suit :
« Expliciter les démarches d’apprentissage pour que les élèves comprennent le sens des enseignements  - Les objectifs du travail proposé aux élèves sont systématiquement explicités avec eux. Les procédures efficaces pour apprendre sont explicitées et enseignées aux élèves à tous les niveaux de la scolarité. La pédagogie est axée sur la maîtrise d’un savoir enseigné explicitement (l’élève sait avant de commencer une leçon ce qu’il a vocation à apprendre et il vérifie lui-même après la leçon qu’il a retenu ce qu’il fallait). L’enseignement est progressif et continu ; la vérification de la compréhension de tous les élèves est régulière. »
Ce qui correspond bien à une application exacte des pratiques de l'Enseignement Explicite, surtout avec les élèves les plus en difficulté.

Dès lors, on ne s’étonnera donc pas, à la lecture de ce dossier, de ne trouver aucune mention de Barak Rosenshine ni de ses travaux fondateurs. Clermont Gauthier, Steve Bissonnette et Mario Richard ne sont cités que dans le but de montrer à quel point ils attaquent « violemment l’approche constructiviste », crime absolu s’il en est aux yeux des auteurs.

Le dossier évoque des généralités sans grand intérêt ou erronées, ne reposant sur aucune donnée probante. Nous restons dans le domaine des croyances et de l'idéologie :


Il présente aussi des exemples de mises en œuvre alambiquées et dénuées d’utilité pratique, ce qui semble être la règle de toutes les “formations” dispensées aux enseignants par l'Éducation nationale.

Au fil de la lecture, on voit apparaître des mentions relatives à des personnages bien connus comme l’inévitable Philippe Meirieu. Il y a aussi Roland Goigoux et sa comparse Sylvie Cèbe qui se démènent beaucoup pour mener à bien le hold-up sémantique sur l’Explicite.

Le laboratoire Escol est très bien représenté, avec son fondateur Bernard Charlot, mais aussi son responsable actuel Stéphane Bonnery (un sociologue) et certains de ses membres : Élisabeth Bautier (une sociolinguiste), Patrick Rayou (un sociologue), Jean-Yves Rochex (un psychologue). Ce laboratoire a l’habitude de parler d’enseignement explicite à la manière de Bourdieu (et certainement pas à la manière de Rosenshine !). Escol se présente comme suit : « Les travaux menés dans le cadre de cette équipe visent pour l’essentiel à étudier et mieux comprendre le renouvellement des processus de production des inégalités sociales et sexuées en matière de scolarisation et d’accès aux savoirs et aux modes de travail intellectuel. » On appréciera la portée de l’œuvre…

Les Cahiers pédagogiques (ceux qui “veulent changer l’École pour changer la société”) sont aussi représentés par Jean-Michel Zakhartchouk (une sorte de patriarche constructiviste qui distribue ses bons et ses mauvais points) et par l’étoile montante Sylvain Connac (qui se présente comme un enseignant-chercheur, mais qui ayant trouvé chez Freinet les réponses à toutes ses questions s'évite donc la peine de chercher autre chose que des admirateurs).

Il ne manque plus que Jacques Bernardin, président du GFEN (un groupuscule constructiviste radical aux origines historiquement staliniennes). Bien entendu, Bernardin n’aime pas l’Enseignement Explicite, mais cela n'empêche pas qu'un de ses articles à charge soit reproduit en intégralité en annexe du dossier. Il y fustige les travaux de Gauthier, Bissonnette et Richard, il confond volontairement l'Explicite avec l'enseignement magistral, il ergote sur le sens qu'il faut donner à l'expression “enseignement efficace”. Bref, les arguments habituels et déjà entendus, mais qui restent toujours sans aucun fondement. De fait, le GFEN ne varie pas, il persiste à répandre ses croyances et ses exécrations aux quelques fidèles qui lui restent. Il continue aussi de passer sous silence toutes les erreurs pédagogiques fondamentales qu'il a défendues et promues depuis sa création. Au point qu'un observateur averti pourrait dire que le GFEN est à la pédagogie ce que le stalinisme fut à la démocratie.

Mais terminons sur une note positive pour souligner l'intérêt du dossier “Enseigner plus explicitement” : l'épaisseur de ses 45 pages sera en effet bien utile pour stabiliser l'armoire bancale d'une classe pratiquant l'authentique Enseignement Explicite. Rien d'autre...

lundi 22 janvier 2018

Pascal Bressoux : « Il y a un gain significatif à réduire la taille des classes »

Fenêtres sur cours, n° 443
18.01.2018



Quel est l'impact de la taille des classes sur les apprentissages ?
Pascal Bressoux : De nombreuses recherches ont été menées sur la taille des classes. Elles n'ont pas toutes la même qualité car ce n'est pas facile d'isoler l'influence de cette variable sur les résultats des élèves. Les classes qui ont des effectifs plus faibles sont souvent celles qui sont composées d'élèves sociologiquement défavorisés et il a donc fallu étudier des groupes comparables. Actuellement la littérature disponible sur cette question montre qu'il y a un gain significatif à réduire la taille des classes. Cette influence est d'autant plus forte qu'on a affaire à des enfants qui sont jeunes. En particulier au début de l'école élémentaire. Le gain est plus fort en élémentaire qu'au collège ou au lycée. Par contre, trop peu de travaux ont étudié cette question pour l'école maternelle. Il y a probablement un gain mais il n'est pas suffisamment documenté. Ce que l'on peut ajouter c'est que la réduction de la taille des classes profite d'autant plus que les élèves sont issus de milieux défavorisés. Ce sont ces enfants qui en bénéficient le plus, même si tout le monde en profite bien sûr. Quand on parle d'effets on ne parle pas d'effets miraculeux. Il y a plus de gain à attendre de la mise en place de pratiques efficaces d'enseignement, mais la taille des classes est une variable plus facilement manipulable.

À quelle hauteur une réduction est-elle utile ?
P. B. : On ne peut pas parler d'effets de seuil, en tous les cas pas dans les tailles de classes qui nous concernent. On a quelque chose d’assez linéaire. Tout un pan de la recherche a dit qu'il fallait réduire d'au moins 5 à 6 le nombre d'élèves par classe pour commencer à mesurer des effets et on trouve une série d’arguments pour une réduction drastique. Mais l'étude de Piketty montre qu'une réduction de trois ou quatre élèves aurait déjà un impact assez fort dans les zones défavorisées. Pour observer des effets on n'est pas obligé de réduire à 12, on aurait déjà des gains dans des classes à 15 ou 16, mais pas aussi forts qu'avec une réduction à 12. Il n'y a, à l'inverse, pas de données sur un nombre minimum d'élèves par classe qui montrerait une limite de ce point de vue sur les apprentissages des élèves.

Quel effet sur les pratiques enseignantes ?
P. B. : Cette question a été étudiée et montre que l'abaissement des effectifs n'a pas beaucoup d'impact sur les pratiques enseignantes, c'est-à-dire sur les méthodes et les styles d'enseignement. Ce qui va changer en revanche c'est l'engagement des élèves dans les tâches. Ils passent plus de temps à travailler. Les enseignants font moins de discipline, interagissent davantage avec les élèves en individuel et cela augmente le temps d’enseignement. L'abaissement des effectifs n'agit pas sur les pratiques mais sur les conditions d'enseignement. Les élèves sont plus visibles aux enseignants, il y a moins de difficulté d’organisation de la classe et ils se mettent donc plus rapidement au travail. La réduction de la taille des classes produit en soi des effets en dépit du fait que les enseignants changent peu leurs méthodes. Cela ne veut pas dire qu'on ne gagnerait pas encore davantage avec des méthodes adaptées. Tout l'enjeu est peut-être là. Réussir à former pour exploiter encore davantage une réduction de la taille des classes, mais il ne faut pas considérer que l'abaissement ne produit des effets qu'en cas de changement de méthodes.

La réduction des effectifs doit elle se poursuivre sur plusieurs années ?
P. B. : Si la réduction des effectifs produit des effets positifs dès la première année, la recherche a également pu montrer que la réduction de la taille des classes doit se poursuivre sur plusieurs années pour avoir un effet durable. Les enfants qui bénéficient de la réduction d'effectifs en CP seront meilleurs en fin de CP mais pas à la fin du CE1, si l'allègement ne s'est pas poursuivi. L’expérience américaine STAR, étude longitudinale de réduction de taille des classes, a permis de montrer que ceux qui en avaient bénéficié longuement maintenaient leur avantage jusque tard dans leur scolarité. Il faut que ça se poursuive au moins au CE1. Est-ce que deux années suffisent ? Un peu plus, c'est toujours un peu mieux et le suivi en CE1 semble important pour que les effets perdurent. On a actuellement des résultats scolaires décevants et notre système génère des inégalités. La réduction de la taille des classes est une mesure qui est à même de réduire ces écarts d'autant plus que la recherche va dans le sens d'un gain important pour les élèves défavorisés.

[Passages surlignés par moi.]

dimanche 14 janvier 2018

Installation du Conseil Scientifique de l'Éducation nationale



Le courant de la Pédagogie Explicite se félicite de l’installation, par le ministre Jean-Michel Blanquer le 10 janvier dernier, du Conseil Scientifique de l’Éducation nationale.

Non seulement, ce Conseil est présidé par Stanislas Dehaene, mais il comptera aussi parmi ses membres Maryse Bianco, Pascal Bressoux, Franck Ramus et Bruno Suchaut qui sont depuis longtemps des chercheurs favorables à l’Enseignement Explicite.

Jusqu’à présent, seules les officines constructivistes, à l’instar de l’IFÉ, étaient admises à délivrer leurs opinions unilatérales, à se prétendre “scientifiques”, et à donner aux enseignants des boussoles indiquant systématiquement le Sud.

Désormais, nous sommes convaincus que le Conseil Scientifique de l’Éducation nationale sera à même de fournir des indications solides et utiles, des données probantes basées sur des recherches sérieuses reconnues au plan international, et à donner aux enseignants des recommandations leur permettant de mettre en œuvre concrètement les pratiques efficaces en classe.

Après des décennies d’errements, le nouveau ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, entend remettre l’École française en état de fonctionner. Il fait preuve d’une volonté sans faille et manifestement il se donne les moyens d’atteindre son objectif. Au grand dam des grincheux du constructivisme pédagogique qui craignent de perdre leur influence et leurs prébendes confirmées une fois de plus par les trois ministres précédents. Leurs pétitions et leurs récriminations, dont Le Café pédagogique se fait chaque jour l’écho, restent lettres mortes.

Et pour cause : les sondages attestent qu’une grande majorité de Français apprécient l’action de Jean-Michel Blanquer et soutiennent ses initiatives. Comme la plupart des enseignants qui veulent accomplir leur mission dans de bonnes conditions et de manière efficace, sans subir des prescriptions qu’ils savent parfaitement ineptes.

L’idéologie, les croyances et les traditions ont rendu l’École française malade depuis trop longtemps. Il lui faut maintenant des remèdes, si possible de cheval, pour la remettre sur pied. Il est grand temps !

Installation du conseil scientifique de l'Éducation nationale